Kim PHUC, figure de proue de la résistance et de la résilience


Kim Phuc est cette fillette hurlant de douleur après un bombardement au napalm lors de la guerre du Vietnam que Nick Ut, photographe américain, a prise en  photo. C’était le 8 juin 1972.

Depuis, le cliché a fait le tour du monde et illustre abondamment l’abomination de la guerre.

Avec Pic's Story, découvrez l'histoire cachée d'un cliché culte, racontée par Marc Brincourt . Pour cet épisode, voici l'histoire tragique derrière la photo de la petite fille au Napalm lors de la guerre du Vietnam, Kim Phuc Phan Thi.


https://youtu.be/BcHGO3r0Liw

Pourquoi la "fille au Napalm" n’a PAS mis fin à la guerre du Vietnam - #Flashback 9

C’est une icône du photojournalisme. Son titre original, "The Terror of War", a fini par s’effacer derrière "Napalm Girl". L’image montre une petite Vietnamienne apeurée, courant nue sur une route. Elle vient d’être gravement brûlée dans un bombardement au napalm, le 8 juin 1972, aux abords de Trang Bang, un village situé à une cinquantaine de kilomètres de Saïgon.

L’image de Nick Ut, un photoreporter sud-vietnamien, fait le tour du monde et marque profondément la mémoire des Américains. Au point que beaucoup finissent par attribuer à "Napalm Girl" une influence décisive : elle aurait mis fin à la guerre du Vietnam. 

https://youtu.be/T8SeyzHe1jk


50 ans après, la photo de la petite fille brûlée au napalm au Vietnam est toujours aussi forte

Kim Phuc n'avait que 9 ans quand sa vie a basculé dans l'horreur. Brûlée à 65% au napalm, elle retrouve symboliquement "Nick" Ut, qui l'a photographiée avant de la sauver... 50 ans après, leur amitié est indéfectible.

https://youtu.be/9B_EYuXPxg8


Kim Phuc : la "petite fille au napalm" invitée de LCI

Celle qui a été surnommée "la petite fille au napalm" est l'invitée de Darius Rochebin sur LCI (21h).

https://youtu.be/eZLxLnn8IT8


« La petite fille au napalm, histoire d'une photographie » dans « La Case du siècle »

Le cliché a fait le tour du monde et fait basculer le cours de la guerre du Vietnam : celui pris par le photographe de la petite fille de neuf ans, brûlée au 3e degré par le napalm des bombes qui viennent de tomber sur son village, et courant en hurlant sa douleur face à l’objectif. Près de cinquante ans plus tard, Nick Ut et Kim Phúc se souviennent de cet instant qui a changé leur vie dans ce documentaire de Patrick Cabouat. 

Diffusé le dimanche 9 avril à 22.45 sur France 5 et accessible en replay

FranceTV  article de fond sur laventure survenue à Kim Phuc.

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« La petite fille de la photo », a connu un parcours hors norme, modèle d’endurance et de résilience.

Elle raconte son parcours dans les colonnes de LA CROIX L’HEBDO.

8 juin 1072, le jour où le drame s’est joué

Le pays est plongé dans une guerre sanglante depuis plusieurs années maintenant, la région est souvent visitée par des guerriers Vietcong ou des forces gouvernementales. La guerre, cependant, ne touche pas Trang Bang et Kim, avec ses parents, ses grands-parents et ses huit frères et sœurs, mène une vie plutôt insouciante, aidant ses parents dans de simples tâches ménagères.

Au début des années 70, les actions de guerre sont de plus en plus fréquentes dans les environs de Trang Bang. Ainsi vient le jour mémorable du 8 juin 1972. Les forces Vietcong occupent le village et les troupes sud-vietnamiennes décident de les attaquer. Une trentaine de civils, dont la famille Phúc, se rassemblent dans le temple local dans l’espoir qu’aucun militaire et guérillero ne s’en prenne à des motifs religieux. Vers midi, cependant, l’un des soldats sud-vietnamiens confond les civils rassemblés dans le temple avec des membres du Vietcong. Soudain, « une grenade fumigène a explosé, couvrant la scène d’un violet et d’or brillants. C’était un signal au pilote sud-vietnamien qui suivait la bataille : lâchez les bombes juste sur cet endroit. »

L’un des soldats près du temple se rend compte de la gravité de l’erreur et commence à crier : « Sortez ! Courez ! Quittez cet endroit ! Ils vont détruire cet endroit ! Fuyez ! Les enfants, courez d’abord ! » Kim, avec les autres enfants, se précipite au temple à la place adjacente, puis tout le monde se s’achemine vers la rue principale du village. Du coin de l’œil, il voit l’avion descendre brusquement en altitude : delà, sous son ventre, partent quatre bombes. Quelques instants plus tard, toute la région est inondée de napalm. L’air brûle, atteignant une température de mille degrés centigrades. Kim brûle. Les vêtements, les épaules, les jambes – tout est en feu. La douleur est immense, mais elle ne s’arrête pas. Elle court droit devant.

Sur la même route, avec les militaires, il y a un très jeune reporter, Nick Ut, qui immortalise l’attaque de l’avion avec son appareil photo.

Le groupe d’enfants atteint l’armée – Kim se souviendra plusieurs années plus tard qu’à ce moment-là, elle a crié : « Nóng quá, nóng quá – trop chaud, trop chaud » L’un des journalistes, Christopher Wain, tend la main et donne de l’eau à la jeune fille. Ensuite, il verse de l’eau sur sa tête et son corps brûlé, mais cela aggrave les choses, car l’oxygène dans l’eau réagit avec le résidu de napalm sur le corps et crée à nouveau du feu. Nick Ut la sauve également, laissant son appareil photo derrière elle, et l’emmène à l’hôpital de Saigon. Les médecins, cependant, déterminent que la jeune fille ne peut pas survivre – environ 30 % de son corps est brûlé. Nick insiste afin de convaincre les médecins d’essayer tout de même. Kim a passé les quatorze mois suivants à l’hôpital et a subi dix-sept interventions chirurgicales.

Pendant ce temps, l’une des photos prises par Nick, qui montre Kim nue, brûlée et terrifiée, courant dans la rue avec les autres enfants, reçoit le prix Pulitzer. La photo s’intitule : « La terreur de la guerre ».

Kim PHUC« Il faut se servir de son passé pour s’élever »

Je continue de porter mon passé, bien sûr, mais de façon différente. À l’époque, j’étais une gamine innocente, souffrant atrocement physiquement et, plus tard, émotionnellement. Aujourd’hui, je ne me considère plus comme une victime, mais plutôt comme une survivante. Je n’ai pas choisi de subir la guerre, ni de figurer sur ce fameux cliché – que j’ai longtemps détesté ! –, mais j’ai choisi ensuite ma vie. Je suis devenue une épouse, une maman, une grand-mère, une militante, etc. J’ai frôlé la mort ce jour de juin 1972, mais le fait d’avoir survécu devait avoir un sens. Celui de témoigner. De témoigner que, même après cela, on peut trouver la paix. Je suis profondément croyante, je suis baptiste. Pour moi, on ne peut rien changer au passé, mais on peut changer l’avenir grâce à l’amour et au pardon.






Son rapport à cette photo qui la rendue célèbre malgré elle

Elle m’embarrassait, je crois. Être exposée ainsi au monde entier, hurlant, toute nue... Et puis, elle me ramenait en permanence au moment le plus douloureux de ma vie : j’avais 9 ans à l’époque et, en une fraction de seconde, mon enfance s’est arrêtée net. Sur cette photo, je crie « Nong qua ! Nong qua ! » (« C’est trop chaud, c’est trop chaud ! ») mais il n’y a pas de mot pour dire ce que je ressentais. Le napalm brûle à 3 000 °C et j’avais l’impression d’être cuite vivante. D’être cuite jusqu’aux os. D’ailleurs, juste après, j’ai perdu connaissance. Et pourtant, comme je vous le disais, j’ai fini par faire la paix avec cette photo. Par la voir, au fil du temps, comme une sorte de don. Elle m’a offert une notoriété qui m’a permis ensuite de promouvoir la paix. 




Aujourd’hui, je garde plein de séquelles physiques. Plein ! En gros, le tiers de mon corps a été brûlé en profondeur. J’ai donc dû enchaîner les greffes de peau (dix-sept, en tout) et les écarts de température restent encore douloureux, de même que certains mouvements. Heureusement, ma vie a totalement changé ces dernières années grâce à un traitement au laser. Avant, sur une échelle de 1 à 10, mes douleurs quotidiennes tournaient autour de 8 ou 9. Aujourd’hui, elles ne dépassent plus 3 ou 4. Rien à voir, donc. Maintenant je « manage » ma douleur, comme on dit ! (Rires.) 

Le processus de guérison est très douloureux, mais en cours de route, quelque chose d’autre se produit – beaucoup plus grave : la colère et la haine surgissent dans le cœur de Kim. Ce sont des émotions négatives et très profondes envers toutes les personnes qui ont causé sa douleur, envers toutes les personnes qui ont tourné le dos, voyant sa peau cicatrisée et déformée. Elle ne se sent plus aimée, acceptée, belle et digne.

Des années et des années plus tard, lors d’une interview, Kim dira : « J’aurais aimé mourir ce jour-là, avec ma famille… C’était difficile pour moi de porter toute cette haine, cette colère. »

Une enfance sacrifiée

J’ai eu eu une enfance sacrifiée. Après avoir perdu connaissance à la suite du bombardement, on m’a emmenée à l’hôpital : là, on a bandé mes plaies mais comme mon état empirait, on a fini par m’envoyer à la morgue. Les victimes de brûlures de guerre survivaient rarement, alors des brûlures aussi sévères... Au bout de deux ou trois jours, mes parents ont réussi à me retrouver et l’on m’a réellement prise en charge. On m’a imposé des bains quotidiens pour empêcher que les brûlures de mon dos, de ma nuque et de mon bras gauche – que des plaies à vif ! – s’infectent. Et ces bains quotidiens... ah ces bains, c’était l’enfer sur terre ! La douleur était telle que je m’évanouissais chaque fois ; les infirmières devaient me maintenir la tête hors de l’eau pour m’empêcher de glisser et de me noyer. C’était abominable. D’ailleurs, je ne l’ai su que bien plus tard, mais ma mère priait pour que je décède, que mes souffrances soient abrégées au plus vite. 


J’ai voulu quitter la vie

J’ai voulu « quitter la vie », parce que je détestais ma vie ! Je souffrais constamment et avec ces cicatrices hideuses, je croyais ne jamais trouver l’amour. Toutes ces années, je n’ai nourri qu’un seul espoir : faire médecine pour devenir pédiatre et venir à mon tour en aide aux enfants. Mais une fois à la fac, je me suis retrouvée instrumentalisée par les autorités vietnamiennes, qui entendaient m’utiliser à des fins de propagande pour dire tout le mal que je pensais de ceux qui avaient brisé mon enfance. Je devais enchaîner les prises de parole, les interventions publiques, les entretiens dans les médias. Devant les journalistes étrangers, les traducteurs mandatés par le gouvernement modifiaient mes propos pour qu’ils collent à ce que le pouvoir attendait de moi. Ce harcèlement constant m’empêchait de poursuivre mes études. Et, oui, à cette époque, j’étais au plus bas. J’étais aux portes du suicide. 



La Bible a changé ma vie

C’est à cette même période queje tombe, par hasard, sur une bible et cela a changé ma vie. C’était le plan de Dieu ! (Rires.) En 1982, je tombe en effet par hasard sur une bible dans une bibliothèque d’Hô Chi Minh-Ville. Je la feuillette et je m’arrête sur le Nouveau Testament. Là, je découvre que Jésus a souffert pour le message qu’il annonçait. Je découvre aussi qu’on peut être aimé de façon inconditionnelle. Et ce baume-là, sur un cœur meurtri comme le mien, c’était extraordinaire ! 

Toutes ces expériences physiques et émotionnelles l’amènent à choisir la médecine comme sujet d’étude. En même temps, elle cherche également un sens plus profond à sa vie et étudie différentes religions. Un jour de 1982, dans sa deuxième année d’université, elle trouve le Nouveau Testament dans la bibliothèque universitaire de Saigon. Elle le prend, s’assoit et commence à feuilleter les pages. Son regard se pose sur la phrase prononcée par Jésus dans l’Évangile de saint Jean : « Je suis le chemin, la vérité et la vie. Nul ne vient du Père si ce n’est par moi » (14, 6). Kim pense d’abord que Jésus est très vaniteux – « il y a des milliers de chemins vers Dieu ; tout le monde le sait. Elle ferme le livre, mais sa réflexion continue – elle se rend compte que, si la phrase prononcée par Jésus est vraie, alors toute sa vie elle a vénéré les mauvais dieux.

Ainsi s’allume en elle une autre pensée : « Ce Jésus, il a souffert pour défendre ses convictions. On s’est moqué de lui. On l’a torturé et tué. Pourquoi ferait-il toutes ces choses, s’il n’était pas vraiment Dieu ? Sa douleur devait avoir un but, sinon il n’aurait pas pu supporter aussi fidèlement la confrontation. Je n’ai jamais considéré Jésus de ce côté – le côté blessé, le côté qui porte les cicatrices. »

Toute réflexion amène Kim à conclure : « Si Jésus est vraiment celui qu’il dit être, et qu’il a enduré tout ce qu’il dit avoir enduré, alors peut-être qu’il pourrait m’aider à donner un sens à ma douleur et, enfin, à accepter mes cicatrices. »

Au cours des semaines suivantes, Kim a approfondi sa connaissance de la religion chrétienne, a parlé à d’autres personnes, a progressivement découvert que la foi naît de l’écoute et que Dieu a un plan pour elle. Elle compare ses expériences douloureuses avec le Dieu qui a souffert. Un jour, elle découvre qu’elle est aimée et voulue par Dieu. Au début de 1983, elle annonce à sa famille qu’elle avait changé de religion – elle a donné sa vie au Seigneur Jésus-Christ.


Je me suis convertie peu après. Ce que mes parents ont pris pour une trahison. Ils étaient adeptes du caodaïsme et, pour eux, je devenais une renégate. J’étais une étudiante sans le sou et, à partir de là, ma mère a refusé de me donner de l’argent. Elle m’a dit : « Tu crois dans ton Dieu, eh bien ton Dieu prendra soin de toi ! » J’ai serré les dents, mais j’ai beaucoup pleuré. Pour la petite histoire, mes parents ont fini par se convertir, mais quinze ans plus tard. 

Au fond, je dirais que la foi dans l’Évangile m’a permis de trouver la paix. La joie, aussi. J’ai progressivement appris à ne plus avoir peur de l’avenir, de la douleur, de moi-même aussi ! Comme si Dieu avait mis une sorte de distance entre moi et ma souffrance. 

Cela m’a aidée à ne pas vivre dans le passé. Sans doute. S’enfermer dans le passé, c’est un piège. On peut s’y noyer. Il ne faut pas le ressasser, mais plutôt s’en servir pour s’élever. Après, pour être honnête, le pardon dont parlait tant la Bible, ça je n’étais pas sûre d’en être capable ! (Rires.) 

Apprentissage du pardon

Le « Aimez vos ennemis », comment dire... ? Il faut se replacer dans le contexte. J’avais tellement d’ennemis à l’époque : les pilotes qui avaient bombardé mon village, les agents du gouvernement qui m’instrumentalisaient pour leur propagande. Le pardon, je n’étais pas prête. Et puis, avec le temps, j’ai fini par comprendre qu’on ne peut pas y arriver seul. Dieu doit nous aider, nous donner la force. D’ailleurs, je dis souvent à Dieu : « Fais ta part, je fais la mienne. » Fifty-fifty ! (Rires.) 

La conversion chrétienne lui a donné la force de pardonner. Aujourd’hui, Kim Phuc vit au Canada, avec son mari et ses deux enfants. Elle a consacré sa vie à promouvoir la paix, fournissant un soutien médical et psychologique aux victimes de la guerre.

« Le pardon m’a libéré de la haine. J’ai encore beaucoup de cicatrices sur mon corps et des douleurs intenses presque tous les jours, mais mon cœur est purifié. Le napalm est très puissant, mais la foi, le pardon et l’amour sont beaucoup plus forts. Nous n’aurons plus de guerre si tout le monde apprend à vivre avec le véritable Amour, l’espérance et le pardon. Si cette petite fille sur la photo pouvait le faire, demandez-vous : est-ce que je peux le faire aussi ? »



Je n’ai plus peur de mon apparence

Je n’ai plus peur de mon apparence, mais ça m’a pris des années. Avant, je me couvrais systématiquement les bras et les épaules pour cacher mes cicatrices. Et puis, un jour, j’ai eu un déclic, lors d’une commémoration à laquelle la reine d’Angleterre m’avait conviée. Pour l’occasion, je m’étais pomponnée, j’avais mis un très joli corsage rehaussé de perles. Le jour J, la reine vient me saluer, me regarde de la tête aux pieds et me dit : « La petite fille de la photo, c’est vous ? Vraiment ? C’est vraiment vous, je n’arrive pas y croire. » Elle ne doutait pas réellement bien sûr, c’était une manière de dire que j’avais bien changé. Il n’empêche, j’étais à deux doigts de relever la manche pour lui montrer mes brûlures, chose tout à fait impensable au vu du protocole ! Mais cet épisode m’a marquée, je me suis dit : « Ces cicatrices, c’est moi, pourquoi les cacher ? » Depuis, je n’hésite plus à porter des manches courtes quand j’en ai envie. Je me fiche pas mal de ce que les gens pensent. J’ai appris à me détacher de tout cela. 

Fonder un foyer

J’ai cru, un temps, ne pas pouvoir trouver l’amour ni fonder une famille. Mais je me trompais, oui. Mais c’est vrai que, jeune, je me comparais en permanence aux autres filles et, avec ma peau de buffle, je pensais que personne ne voudrait de moi. J’ai finalement trouvé l’amour. Voilà un peu plus de trente ans que Toan partage ma vie. Il m’a acceptée telle que je suis, inconditionnellement. 

Quant à la maternité, les médecins m’avaient répété toute ma jeunesse que mon corps avait trop souffert pour enfanter, qu’il avait été mis à trop rude épreuve pour résister à un accouchement. Et ils se trompaient. Nous avons eu deux garçons, Thomas et Stephen, et trois petits-enfants ! 


Après Cuba, le Canada

Une fois émigrée, j’ai fait le choix de m’engager, de témoigner, de militer et de créer une ONG en faveur de la paix sans l’avoir prévu au départ. Il s’est passé la chose suivante : en 1995, alors que je me promène dans une rue de Toronto avec une amie, un journaliste me prend en photo et, le lendemain, le cliché fait la une du Toronto Sun qui explique que la « petite fille de la photo », comme on m’appelle souvent, vit désormais au Canada. Je suis alors assaillie de messages, tous bouleversants. Autour de moi, tout le monde me dit : « C’est toi, la fillette brûlée au napalm ? Non ! » 


Engagement, témoignage, militance

J’ai eu un déclic quelques jours plus tard. Je me revois encore, dans le salon, j’avais mon aîné dans les bras, je regardais cette une du Toronto Sun et je me suis dit : il est hors de question que mon fils souffre comme j’ai souffert, c’est juste impossible. Et, plus largement, il est inacceptable que d’autres enfants paient, comme moi, le prix de la guerre. Ensuite, tout a été très vite. Je me suis engagée, de façon très simple au départ, en témoignant tout simplement. En expliquant l’abomination de la guerre, en prônant la paix. Mais aussi le pardon et l’espoir. Il faut s’accrocher à l’espoir, toujours. 

Super Héros  Kim Phuc, la puissance du pardon

L’histoire de Kim Phuc c’est la puissance du pardon, la force de la vie, l’énorme force de la vie. Depuis que je l’ai découverte, j’y pense très souvent et, en creusant pour vous la présenter, j’ai pleuré tout le temps, de tristesse, puis de reconnaissance. 

Il était donc une fois une petite fille, heureuse dans son village de Trang Bang, avec sa famille, ses amis, son chien. Heureuse d’être avec les siens mais grandissant dans le nord d’un pays en guerre, une région magnifique dans un pays qui l’est tout autant, le Viêt-Nam, pris dans une guerre avec les USA qui dura en tout 21 ans (1955-1976).

En ce jour de 1972, une unité américaine dirigée par le capitaine John Plummer décide de brûler le village au Napalm "sans viser les habitants".

CHANGEURS DE MONDE

À partir de là, je fais la paix avec cette fameuse photo de 1972, en quelque sorte, oui. En tout cas, à ce moment-là, je me dis que ce cliché me poursuit quoi que je fasse et où que je sois... et que cela ne sert à rien de lutter contre ce fait. Il faut plutôt en faire quelque chose. 

En 1996, lors d’une commémoration liée au Vietnam, je rencontre le capitaine responsable des bombardements sur votre village.(Silence.) Il répétait en boucle : « Je suis tellement désolé. Tellement désolé. Tellement désolé... » Il pleurait comme un enfant. Il m’a demandé si je lui pardonnais, et je lui ai répondu que oui. Durant toutes ces années, j’avais travaillé tous les jours sur le pardon et, à ce moment- là, j’étais prête. Je crois même pouvoir dire que j’étais reconnaissante de pouvoir accorder mon pardon à cet homme. 

The Kim Fondation International

Après cette rencontre, j’ai décidé de fonder The Kim Fondation International. C’est une ONG engagée auprès des enfants blessés ou gravement handicapés du fait de la guerre. Nous levons des fonds en partenariat avec d’autres organisations pour ouvrir des dispensaires, des écoles, des bibliothèques. L’idée est de réparer, dans la mesure de nos moyens, évidemment, l’impact de la guerre sur tous ces enfants. 

Aujourd’hui comme ambassadrice de bonne volonté de l’Unesco, je tente, sur la base de mon expérience, de rappeler l’abomination de la guerre. Vous savez, on tient trop souvent la paix pour acquise. Non. Elle n’arrive pas par accident, comme ça (Elle claque des doigts.). La paix, il faut y travailler sans cesse, sans cesse, sans cesse. Regardez ce qui se passe en Ukraine. 

“Le photographe Nick Ut m’a sauvé la vie”

Avec cette photo extraordinaire, Nick a bouleversé ma vie. Mais il m’a aussi sauvé la vie. Après avoir pris la photo, il a posé son appareil, m’a enveloppé dans une couverture et m’a emmenée me faire soigner. Je lui en suis éternellement reconnaissante.


Courrier International

Mots d’Images 

La Croix L'Hebdo - samedi 11 juin 2022 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Phan_Thị_Kim_Phúc

Le témoignage de Kim PHUC sur le site zenit - mars 2023

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