Résister, un poème de Ruben Saillens

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Résistez ![1] 

En souvenir de Marie Durand emprisonnée 30 ans ans à la tour de Constance à cause de sa foi. Nous ne chercherons pas à résister au plaisir de proposer son émouvant poème.

Résister : Un Hymne à la Détermination

Marie Durand

Marie Durand est une figure emblématique du protestantisme français, surtout connue pour sa longue incarcération pour raisons religieuses. Née en 1711 et morte en 1776, elle fut emprisonnée à la Tour de Constance à Aigues-Mortes de 1730 à 1768, soit pendant 38 ans, pour avoir refusé d'abjurer sa foi protestante. 

Elle est souvent citée comme un symbole de résistance et de persévérance face à l'intolérance religieuse, notamment après la révocation de l'Édit de Nantes en 1685. L'inscription "RESISTER", gravée sur la margelle du puits de la prison, est traditionnellement attribuée à Marie Durand, bien que cette attribution ne soit pas certaine. 

Son histoire inspire encore aujourd'hui, illustrant la lutte pour la liberté de conscience et les droits humains. Sa vie a été documentée à travers une cinquantaine de ses lettres qui ont été publiées, offrant un témoignage poignant de sa foi et de sa résilience.

Le poème "RÉSISTEZ", signé par le pasteur Ruben Saillens, évoque la lutte et la résilience de Marie Durand face à l'oppression. À travers des images puissantes et des symboles forts, le poème rend hommage à travers la figure de marie Durand celles et ceux qui, malgré les adversités, choisissent de résister. En analysant les thèmes de la souffrance, du courage et de la mémoire, nous mettons en lumière l'importance de ce mot emblématique : "Résistez".

La Pérennité du Message

Le poème conclut sur une note d'espoir. Bien que le roi Louis XIV et la femme Marie Durand soient morts, le mot "Résistez" continue de briller. Cela souligne la force durable de la résistance et la manière dont les mots peuvent transcender le temps et l'espace. La mémoire de ceux qui ont lutté perdure, et leur message reste pertinent.

Conclusion

"RÉSISTEZ" est un poème puissant qui rappelle l'importance de la résistance face à l'oppression. À travers des symboles forts et des images évocatrices, il nous invite à réfléchir sur notre propre engagement et notre capacité à résister. En célébrant la voix des opprimés et en honorant la mémoire des luttes passées, le poème nous incite à ne jamais oublier l'importance du principe de résistance.

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Non, ce n’est pas la lourde grille

            Ni ton mur noir,

Sombre tour, funèbre bastille,

            Que j’aime à voir !

Mais ces traits qui, par une femme,

            Furent sculptés,

Ce mot qui recouvre un long drame :

            Résistez !

 

À genoux sous ces voûtes grises,

            J’ai retrouvé

Ces quelques lettres indécises

Sur le pavé ;

Et j’ai pleuré, noble victime

Des cruautés,

En épelant ton cri ultime :

Résistez !

 

Ce mot, une main inhabile

Le cisela ;

Une aiguille, instrument débile,

A fait cela.

Mais quels combats d’une âme fière

Sont racontés

Par ces huit lettres sur la pierre :

Résistez !

 

Lorsqu’elle vit – la Cévenole

Aux cheveux blancs,

Qui soutenait par sa parole

Les cœurs tremblants,

Qui ranimait par son courage

Les volontés,

Montrant écrit sur son visage

Résistez !

 

Lorsqu’elle vit, la femme austère,

La mort de loin,

Elle voulut que cette pierre

Fût son témoin,

Et, pour prévenir après elle

Les lâchetés,

Elle écrivit sur la margelle :

Résistez !

 

En ce temps-là, dans son Versailles,

Le roi riait,

Tandis qu’ici, sous ces murailles,

La Foi priait.

L’un écrivait, dans une fête,

Persécutez !

L’autre écrivait, baissant la tête :

Résistez !

 

Et c’est toi qui fus la plus forte,

Vaillante Foi !

Depuis longtemps la femme est morte

Et mort le roi,

Mais, tandis que sceptre et couronne

Sont emportés,

Dans la tour ce vieux mot rayonne :

Résistez !

[1]    La Tour de Constance, à Aigues-Mortes, est l’un des monuments les plus sacrés qu’un chrétien français puisse contempler. C’est là, on le sait, que furent enfermées, après la révocation de l’édit de Nantes, les femmes héroïques qui avaient été surprises aux assemblées du Désert, et qui ne voulurent pas abjurer leur foi. Tout huguenot devrait, au moins une fois, visiter cette vieille tour, qui, bien que remontant au XIIIè siècle, et même, dit-on, à Charlemagne, emprunte toute sa gloire aux prisonnières qui l’ont habitée à une époque comparativement récente.

      Au centre de la grande salle, sur la margelle qui donne accès aux oubliettes, un mot est écrit dans la pierre : REGISTER. L’orthographe est incorrecte, mais le sens est sublime. On suppose que ce mot fut tracé par l’une des prisonnières qui, se sentant mourir, voulut laisser à ses compagnes d’infortune un avertissement ; leur faire entendre, pour ainsi dire, une voix d’outre-tombe, pour les prémunir contre les obsessions des moines convertisseurs qui ne cessaient de les visiter. (Notes d'Anne Ruolt)


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