Finlande - la député Päivi Räsänen et l’évêque luthérien ne sont pas au bout de leurs peines

Rappel des faits

En 2019,  la députée du parti Chrétiens-démocrates Päivi Räsänen avait partagé sur X (ex Twitter) Romains 1, 24-27 sur X (Twitter à l’époque) et a écrit -sur l’invitation de l’évêque Juhana Pohjola- une brochure sur le mariage et l’homosexualité en 2004 défendant la compréhension biblique de la sexualité et du mariage. Cette double publication leur a valu des pousuites en pénal sous prétexte qu’elle avait attisé un discours de haine envers les homosexuels.

En première instance, les deux personnalités ont été acquittées.


Nous avions suivi  cette affaire emblématique emblématique de la liberté d’expression et de la libre communication en Finlande et … en Europe sur ce blog à deux reprises (1) et (2).


Procès en appel

 Bien que les prévenus aient été acquittés à l’unanimité en première instance par un tribunal de district finlandais en 2022, les procureurs ont fait appel de leur acquittement devant la Cour d’appel d’Helsinki. La Tribune chrétienne  et Evangéliques.info viennent de faire état du procès en appel fixé à la date du 31 août et du 1er septembre 2023.  Les débats ont eu lieu sur deux jours et le jugement est mis en délibéré le 30 novembre.

Procureur : l'interprétation de la Bible par Räsänen est "criminelle".

Le parquet a déclaré que "les auteurs de la Bible ne sont pas accusés »Antérieurement, les versets bibliques avaient été pourtant désignés comme «homophobes»Selon ce magistrat, "Vous pouvez certes citer la Bible, mais l'interprétation et la conviction de Räsänen sur ces versets bibliques sont criminelles ». S'adressant à l'accusée, le ministère public s'est exprimé en ces termes : "Vous pouvez croire ce que vous voulez, mais vous ne pouvez pas parler de tout ce que vous croyez". Le point n'est pas de savoir "si c'est vrai ou non, mais que c'est insultant".

ADF : Räsänen n'a pas rétracté sa foi lors du contre-interrogatoire

Le directeur général d'ADF International, Paul Coleman, a déclaré à propos du procès : "Le cœur du contre-interrogatoire mené par la procureure était la question suivante : Päivi Räsänen renierait-elle sa foi ? La réponse a été non - elle ne renie pas les points centraux de sa foi. La procédure pénale épuisante à laquelle Mme Räsänen est soumise est le contraire de la démocratie et du 'progrès'. Nous continuerons à soutenir Päivi Räsänen et attendons la décision du tribunal pour savoir si l'expression des convictions chrétiennes est un crime en Finlande".

L'évêque : condamner le péché ne remet pas en cause la dignité de la personne

L'actuel évêque du diocèse missionnaire évangélique luthérien de Finlande (depuis 2021), Juhana Pohjola (Helsinki), était également sur le banc des accusés. Il avait publié la brochure ecclésiastique en 2004. Devant le tribunal, Pohjola a souligné que le texte mettait constamment l'accent sur la dignité et l'égalité de tous les êtres humains - indépendamment de leur orientation sexuelle. Il a déclaré au tribunal : "Condamner le péché ne signifie pas remettre en question la dignité et la valeur d'une personne. Ce sont deux choses complètement différentes. Le ministère public promeut une conception qui va à l'encontre de la foi chrétienne. Condamner le péché ne remet pas en question la dignité de la personne ».

L’affaire met en cause la liberté d’expression 

Paul Coleman, directeur exécutif de l’Alliance Defending Freedom International (ADF) a déclaré dans un communiqué que “la poursuite implacable” de Räsänen “cherche à réduire au silence les autres”. Coleman a souligné que “dans une société démocratique, chacun devrait être libre de partager ses convictions sans craindre des poursuites judiciaires de l’État”.

Au sortir du tribunal, la femme politique a déclaré : "Je suis confiante dans le fait que je serai acquittée des accusations portées contre moi. Ce sera un jugement très important pour la liberté de religion et d'expression en Finlande, avec des répercussions dans toute l'Europe. Mais j'ai bon espoir que le tribunal prendra une bonne décision".


Deuxième procès pour des convictions partagées sur twitter

Päivi a été acquittée à l’unanimité il y a plus d’un an. Mais le ministère public s’obstine et continue de poursuivre cette parlementaire finlandaise pour ‘discours haineux’

Assurons ensemble une défense solide contre ceux qui la poursuivent en justice, déterminés à la sanctionner et à la réduire au silence. 

Les lois dites ‘contre le discours haineux’ menacent la liberté d’expression à travers l’Europe. Elles reposent sur des définitions floues, nuisent à la réputation des ‘infracteurs’ et ouvrent la voie à des procédures judiciaires coûteuses. Nous controns cette avancée.

AFD dans son appel aux fonds

Définition des « discours de haine » selon l’AFD International

Dans de nombreux pays, les insultes et autres propos portant atteinte à l’honneur d’une personne font déjà l’objet de poursuite judiciaire. Régulièrement, de telles lois exigent l’examen d’une déclaration dans son contexte. En effet, ce qui peut constituer une insulte dans une situation ne l’est pas forcément dans une autre.

Désormais, des lois dites contre le ‘discours de haine’ sont introduites dans de nombreux pays. Contrairement aux lois mentionnées ci-dessus, elles font délibérément abstraction du contexte. Un certain mot ou une certaine déclaration est sorti(e) de son contexte, considéré(e) seul(e) et donc complètement laissé(e) à la perception et à l’interprétation subjectives de l’auditeur ou du lecteur. Chacun ayant une sensibilité différente, les déclarations peuvent être interprétées de différentes manières. Les lois sur le ‘discours de haine’ sanctionneraient et censureraient donc les déclarations de manière inégale et arbitraire. Et dans le pire des cas, de simples divergences d’opinion seraient alors soumises à la censure. Ce résultat est absurde, car l’échange libre d’opinions, même controversées, est fondamental pour la démocratie.

Le tweet de Päivi Räsänen sur la Helsinki Pride 2019 n’a donc pas été considéré dans le contexte de la foi de Räsänen et des enseignements chrétiens qui façonnent sa vision du monde et son opinion. Cette simple divergence d’opinion, tout à fait normale dans une communauté pluraliste, est à présent réinterprétée comme une discrimination à l’égard d’une orientation sexuelle particulière et, de ce fait, comme une attaque contre certaines personnes.

Päivi Räsänen et l’évêque Pohjola sont poursuivis pour le crime d’ « agitation ethnique », dans la section des « crimes de guerre et crimes contre l’humanité » dans le Code pénal finlandais. Et ce, seulement parce qu’ils ont exprimé des vérités chrétiennes sur internet, dans un livret, et dans un débat radiodiffusé ! Au fil du temps, l’interminable procédure juridique est d’ailleurs devenue une punition en elle-même : en voyant le sort qui est réservé à ces deux personnalités de la vie publique, toute personne ordinaire comprendra bien vite qu’il est plus sûr de garder ses convictions pour soi.

Selon le procureur, les convictions de Räsänen, pourtant enracinées dans la Bible et la tradition chrétienne, sont haineuses et criminelles. En Finlande, et à travers l’Europe, le message devient de plus en plus clair : si vos idées diffèrent de celles de l’état, surtout, n’en parlez pas.

Ce procès montre jusqu’où le ministère public est capable d’aller pour réduire au silence et sanctionner les voix exprimant des idées qui ne correspondent pas à sa propre vision du monde.

AFD International

Plaidoyer pour la liberté dexpression

La liberté d’expression vaincra-t-elle en Finlande? En célébrant le premier anniversaire de son acquittement le 30 mars, la parlementaire finlandaise Päivi Räsänen a bon espoir – même si le procureur général ne lâche pas prise, et qu’elle devra bientôt se présenter devant la cour pour un deuxième procès sur son tweet biblique.

Pourtant, le 30 mars 2022, le tribunal régional de Helsinki l’avait acquittée de toutes les charges, en statuant “qu’il ne revient pas au tribunal d’interpréter des principes bibliques”. Mais en avril dernier, le procureur a interjeté appel contre l’acquittement, en demandant une amende de dizaines de milliers d’euros ainsi que la censure des ouvrages de Räsänen et Pohjola.

“La continuation de cette campagne de censure contre des idées pacifiques crée un précédent dangereux et montre bien à quel point la liberté d’expression est menacée. Je vais continuer à me battre pour la défendre parce qu’elle est la pierre angulaire de toute société libre et démocratique. J’espère que la Cour d’appel suivra la décision du tribunal régional et que je serai à nouveau acquittée” dit Päivi. Elle vous raconte comment elle a vécu le procès jusqu’ici.

La liberté d’expression tombe encore plus bas

L’ancienne ministre de l’Intérieur avait été accusée de “crime de haine” parce qu’elle avait partagé ses idées d’inspiration religieuse sur le mariage et la sexualité dans un tweet et lors d’une émission-débat à la radio en 2019, et dans un livret rédigé en 2004. Mgr. Pohjola, de son côté, était accusé d’avoir publié ledit livret pour le distribuer ensuite aux membres de sa congrégation il y a 17 ans. Le procès avait été fortement médiatisé l’an dernier, tandis que des experts en droits de l’homme se disaient inquiets de la menace qui pesait sur la liberté d’expression en Finlande.

“Lorsqu’une parlementaire respectée est mise en procès à deux reprises parce qu’elle a partagé ses convictions profondes par un tweet quatre ans plus tôt, on ne peut que conclure que la liberté d’expression en Europe est tombée encore plus bas. Toute personne qui comprend l’importance de la liberté d’expression devrait s’indigner du fait que cette chasse aux sorcières continue. Le procureur veut que Päivi serve d’exemple; à travers elle, le procureur cherche à faire taire d’autres voix croyantes. Cela n’a pas marché la première fois, et nous espérons que la liberté va gagner une fois de plus” a déclaré Paul Coleman, auteur du livre ‘Censored: How European Hate Speech Laws are Threatening Freedom of Speech’ (Censuré: Comment les lois sur le discours haineux menacent la liberté d’expression) et Directeur Exécutif d’ADF International, l’association de défense juridique qui accompagne l’avocat de Päivi Räsänen.

Jugée pour un tweet

L’enquête policière contre Räsänen a débuté en juin 2019. En tant que membre active de l’Église évangélique-luthérienne de Finlande, elle avait envoyé un tweet aux responsables de son église pour les questionner sur leur décision de soutenir officiellement l’évènement LGBT « Pride 2019 », en ajoutant une photo d’un passage de l’Épître aux Romains. Ce tweet a donné lieu à des investigations supplémentaires, qui ont même remonté jusqu’à un livret religieux qu’elle avait rédigé il y a près de 20 ans.

Au cours des deux dernières années, Räsänen a dû subir des interrogatoires de police pendant treize heures au total. Chaque fois, les policiers l’interrogeaient sur ses convictions chrétiennes et lui faisaient développer son interprétation de la Bible.

En avril 2021, la procureure générale avait retenu trois chefs d’accusation contre Räsänen, malgré la forte recommandation de la part des services de police d’abandonner les poursuites pour deux de ces charges. Par ailleurs, les propos tenus par Räsänen n’enfreignent en aucun sens les règles de Twitter ni celles de la chaîne radio nationale, ce qui explique pourquoi on peut toujours les retrouver sur ces plateformes.

Le procès de la Bible

Pendant les deux jours d’audience, le 24 janvier et le 14 février 2022, l’avocat de Räsänen, soutenu par l’association de défense juridique ADF International, avait fait valoir qu’un jugement de culpabilité porterait gravement atteinte à la liberté d’expression en Finlande. Selon lui, les propos de Räsänen correspondent aux enseignements chrétiens.

Dans son jugement, la cour a admis que s’il est vrai les propos de Räsänen peuvent déranger certaines personnes, “il faut qu’il y ait une raison impérieuse d’intérêt général pour intervenir et restreindre la liberté d’expression”. Selon la cour, il est clair que dans ce cas, une telle raison fait défaut.

Le 30 mars 2022, le tribunal régional de Helsinki avait prononcé un acquittement et condamné le ministère public à payer les frais de justice qui s’élèvent à plus de 60.000 euros. Cependant, à la différence de beaucoup d’autres juridictions, la loi finlandaise permet au procureur d’interjeter appel de tout verdict de non-culpabilité jusqu’à la Cour suprême de Finlande. Pour sa part, Räsänen se dit prête à défendre la liberté d’expression devant n’importe quelle instance, au besoin même devant la Cour européenne des Droits de l’homme.

Räsänen est membre du parlement finlandais depuis 1995. Elle a présidé le groupe des Chrétiens Démocrates de 2004 à 2015 et a été ministre de l’Intérieur de 2011 à 2015, chargée entre autres des affaires religieuses en Finlande.

ADF INTERNATIONAL

Un commentaire de Ludwig Brühl (Vienne), porte-parole de l'organisation chrétienne des droits de l'homme ADF International) sur le procès.


Comment les lois sur le "discours incitant à la haine" contredisent la liberté d'expression

Le procès de Päivi Räsänen en Finlande fait figure de référence pour les chrétiens européens. L'auteur de best-sellers américain Rod Dreher a même parlé du "procès du siècle". L'enjeu à Helsinki n'était rien de moins que la question de savoir si les chrétiens peuvent défendre leurs convictions en public.

La députée Päivi Räsänen était - à nouveau - jugée. Il s'agit déjà en deuxième instance de savoir si ses convictions chrétiennes sur le mariage et la morale sexuelle sont couvertes par la liberté d'expression. Concrètement, Räsänen avait défendu en 2019 sur Twitter et à la radio, et en 2004 dans une publication de l'Eglise, l'opinion suivante en substance : selon la doctrine chrétienne, tous les êtres humains sont à la fois créés à l'image de Dieu et pécheurs. De plus, tous les êtres humains sont égaux en dignité. Parallèlement, la pratique de l’homosexualité s'oppose à la vision chrétienne du mariage et de la sexualité.

Pour cela, Räsänen a été accusée en 2021 de "discours de haine". Cette accusation relève du domaine pénal des "crimes de guerre et crimes contre l'humanité". Räsänen risque de lourdes amendes et la censure de ses déclarations. Cette grand-mère de dix enfants siège au Parlement depuis 25 ans et est reconnue comme médecin, ancienne ministre de l'Intérieur et chef du parti chrétien-démocrate. Sur des sujets controversés, elle s'exprime de manière réfléchie, claire et affectueuse. Des phrases comme "chaque être humain a une dignité" et "Dieu aime chaque individu, quelle que soit son orientation sexuelle", elle les prononce avec conviction et les répète sans cesse, même au tribunal. C'est pourquoi cette affaire judiciaire est si décisive pour les chrétiens. Car la criminalisation explicite de contenus importants de sa propre foi aurait de graves conséquences pour tous.

Criminalisation de contenus chrétiens

Le déclencheur du procès contre Räsänen a été un tweet biblique qu'elle a adressé en juin 2019 à la direction de sa propre église luthérienne. Elle y remettait en question la décision de l'Eglise de soutenir l’événement de la Gay Pride. Elle a joint à son tweet une image de versets de Romains 1.

Il s'en est suivi 13 heures d'interrogatoire par la police pendant plusieurs mois. Les policiers, ainsi que le procureur, ont régulièrement interrogé Räsänen sur sa compréhension de la Bible. Le premier jour du procès, le procureur a qualifié de "criminelle" l'interprétation et la publication des versets bibliques par Räsänen. La procureure avait également une opinion claire sur la conviction fondamentale de Räsänen : "Ce qui est déterminant, ce n'est pas que ce soit vrai ou non, mais que ce soit offensant".

Au deuxième jour du procès, la procureure s'est concentrée sur un petit livret intitulé "Il les a créés homme et femme", que Räsänen avait écrit en 2004 pour son église. Räsänen doit maintenant en répondre, bien que la loi en vertu de laquelle elle est accusée ne soit entrée en vigueur que des années après la publication du livret.

En fait, Räsänen avait déjà été acquittée l'année dernière par le tribunal de district d'Helsinki. Mais le parquet finlandais a fait appel, car pour lui, certaines convictions chrétiennes doivent être censurées : "Vous pouvez croire ce que vous voulez, mais vous êtes limités dans les convictions que vous pouvez exprimer", a-t-il déclaré au deuxième jour du procès. Dès le début de l’enquête policière, la procureure générale a déclaré dans une interview que l'on pouvait certes citer des livres historiques comme le Coran, Mein Kampf ou la Bible, mais que l'on ne pouvait pas exprimer soi-même publiquement les opinions qui y sont défendues. Le fait qu'elle mette tous ces livres dans le même sac trahit sa position à ce sujet. La cour d'appel d'Helsinki doit rendre son jugement avant le 30 novembre.

Les chrétiens d'Europe se sont trop longtemps tus face à de telles déclarations et menaces. Il s'agit maintenant de soutenir Räsänen et de réfléchir à ce que nous pouvons faire concrètement pour la liberté de religion et d'expression.

- IDEA 04.09.2023

L’affaire très médiatisée pose la question de la liberté religieuse en Finlande

Päivi Räsänen, députée finlandaise poursuivie pour avoir déclaré que les actes homosexuels sont des péchés, a été entendue par une cour d’appel le 31 août et le 1 septembre.

Räsänen a remporté son premier procès, mais le gouvernement finlandais a fait appel de sa défaite.

Lors de l’audience d’appel, le procureur a insisté sur le fait que toute déclaration d’opposition à l’activité homosexuelle est une condamnation des homosexuels et constitue donc un discours de haine. Le procureur a à plusieurs reprises poussé Räsänen à rétracter sa vision de la sexualité biblique, telle qu’exprimée dans un pamphlet de 2004. Elle a refusé.

L’évêque luthérien Juhana Pohjola, jugé avec Räsänen pour avoir publié son pamphlet, a déclaré : "Condamner les actes de péché ne signifie pas remettre en question la valeur et la dignité d’une personne. Ce sont des choses complètement différentes. Le procureur propage une compréhension qui est totalement contre la compréhension chrétienne.»

Il a ajouté, "L’idée même de la liberté religieuse est que vous êtes libre d’enseigner le message chrétien, même si quelqu’un le trouve offensant, mais alors vous pouvez exercer votre droit de ne pas écouter."

Le verdict n’est pas attendu avant l’année prochaine selon l’AEM.

Alliance évangélique mondiale - 22 septembre 2023

TRIBUNE CHRÉTIENNE - le 31 août 2023

Evangéliques Info, le 5 septembre 2023

idea.de N°187

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