Le contexte : notre travail d’implantation d'église

Précédent

1984 - 1993 : Neuf ans de travail pionnier en Corse marquent une vie... notre vie de couple et notre vie de famille.

Nous partions de l’intuition que la Corse était une terre de mission. Longtemps délaissée et réputée difficile d’approche, la Corse n’a pas attiré beaucoup de missions. Le catholicisme est la religion dominante, mais à ce catholicisme se mêlent bien des éléments superstitieux et occultes.  On y dénombre peu d’Eglises protestantes sur place, malgré leur implantation relativement ancienne (19e siècle pour l’ERF); les communautés les plus importantes se retrouvent dans les deux grandes cités insulaires, Ajaccio et Bastia.

Mais pourquoi avons-nous privilégié le centre de l’île, Corte, comme base de notre mission? De par le poids de l’histoire, Corte joue un rôle moteur; il est un lieu de rencontre entre le Nord et le Sud de l’île;  l’Université et ses milliers d’étudiants y ont trouvé asile. Nous aussi, car nous pensions en outre  qu’il nous serait plus facile de rejoindre le restant de l’île, ce qui s’avérera exact dans le temps.

Nous débarquions à Corte avec pour seules armes et bagages une tente et quelques adresses. La presse locale nous a facilité la tâche en publiant un article. Très vite, un logement se libérait et nous entamions l’évangélisation. Cette évangélisation prit des formes classiques et d’autres un peu moins. Le quadrillage de la ville fut organisé; tous les habitants ont été visités systématiquement et au minimum un journal leur était remis. Mais à côté d’une approche classique,  nous avons expérimenté une approche plus douce; nos contacts, nous les accompagnions dans leurs loisirs pour en faire  des amis (“les apprivoiser”). Au fil des mois et de nos engagements associatifs, tout un réseau d’amitié s’est mis en place, auquel nous avons proposé des projections de films, des soirées thématiques. A l’Université, nous avons tenu des stands et visité les étudiants dans leur Cité U en faisant du porte-à-porte, dénichant au passage  des étudiants en recherche.

Le porte-à-porte sera délaissé comme formule d’évangélisation, le jour où nous découvrirons que les Témoins de Jéhova s’étaient fait passer pour nous, déroutant ainsi le public du quartier. Le Seigneur nous ouvrait alors les portes de la radio (RCV), nous permettant de proclamer l’Evangile comme jamais durant plus de six ans à des heures très intéressantes. Non seulement cela, mais les responsables de l’association ont tenu à me faire entrer dans le CA de l’association et m’ont parachuté secrétaire de l’association pendant ces années. Une occasion  de plus pour encore mieux nous insérer dans le tissu social local et de faire valoir l’Evangile dans la durée et de façon vivante dans cette cité.

A partir de ces contacts initiaux se formera une communauté  sur place, avec des natifs et des étudiants de passage (une année plus de cinq étudiants congolais). Longtemps, nous occuperons des locaux associatifs ou municipaux, mais le moment arrivera où nous aménagerons une cave pour en faire une salle de culte.

Pour nous ressourcer, nous rejoindrons une fois par mois une famille à Porto-Vecchio; ce rythme de visites sera maintenu au fil des années; le groupe de Porto-Vecchio s’étoffera et des baptêmes seront célébrés. 

Autre piste suivie, la desserte du groupe d’Ajaccio formé de jeunes convertis de souche et suivi par J. M..  J’en assurerai aussi le suivi pastoral à un rythme régulier. Là aussi, nous avons eu le bonheur de célébrer des baptêmes. Périodiquement, les trois cellules de l’Eglise évangélique libre en Corse se regrouperont pour célébrer un culte ou une journée communautaire, ce qui contribuera à rapprocher les frères et soeurs de l’Eglise.

Durant ces années, il nous a été donné de vivre des rapprochements substantiels avec la Mission Vie Nouvelle installée à Calvi, qui, en retour de réunions de sensibilisation missionnaire, nous apportera un soutien financier précieux pendant ces années. Contact était aussi pris aussi avec les Eglises évangéliques libres d’Allemagne, qui à leur tour participeront aussi pour leur part au financement de ce poste. Sur place, je relève au moins deux années de grâce particulières, où nous avons vu des chrétiens de tous les horizons protestants se retrouver pour une journée de culte et de partage sous les pins larricio du Col de Vizzavonna. Evénement unique et mémorable.

A noter également l’entente de toutes les familles culturelles et cultuelles (y compris évangéliques et catholiques) pour mener à terme un projet, la traduction des Evangiles en langue corse sous les auspices de l’Alliance Biblique Universelle. Un projet, qui mettra plusieurs années à aboutir. Cet ouvrage, pour modeste qu’il soit, pourrait devenir un livre de référence en Corse, dans un pays qui se réapproprie sa langue maternelle, de la maternelle à l’Université.

Par son sens de l’hospitalité, le Corse enchante; sa spiritualité naturelle est diffuse, confuse, ses traditions mêlées de paganisme avec seulement un zeste de christianisme. Et pourtant, il y a pour le peuple corse de l’espoir, pour peu qu’il prenne au sérieux la parole de Dieu, qui lui vient. Et pour peu que  l’Eglise locale, renforcée par le soutien généralisé des chrétiens de partout, partage avec courage cette parole de vie. Bon courage aux suivants qui relèveront le défi permanent de la proclamation de l’Evangile sur la terre corse! jp.w

© jp.w 2025 - Contact