Congrès international SEMF - 1-3 juin à Montpellier - Les mouvements protestants de Réveil dans le monde francophone 

Congrès organisé à Montpellier du 1er au 3 juin 2023 :

Les mouvements protestants de Réveil dans le monde francophone 

(Europe, Afrique, Algérie, Madagascar)

 Origines, courants, développements et diversifications du XIXe siècle à nos jours

 

Ce congrès international est conjointement organisé par : 

- la Société d’Études du Méthodisme Français (SEMF)

- le Manchester Wesley Research Centre (MWRC)

- le Centre Maurice-Leenhardt de recherche en missiologie (CML) de l’Institut Protestant de Théologie (IPT)

- le Centre de Recherches Interdisciplinaires en Sciences humaines et Sociales (CRISES) de l’Université Paul-Valéry Montpellier 3 (UPVM)

- et la Société d’histoire du protestantisme de Montpellier

 

Argumentaire

Nés à la charnière des XVIIIe et XIXe siècle, du sein des protestantismes historiques d’Europe, les mouvements de réveil religieux (Revival, Awakening, Erweckung), sont une réponse, pas nécessairement une opposition, au siècle des Lumières qui avait promu le règne de la raison humaine face à celui de la révélation divine. Ces mouvements, prétendant opérer une « seconde Réforme », ont voulu redonner vigueur à la lecture de la Bible devenue rare dans un pays comme la France, et faire place à l’émotion et à l’expérience religieuse pour entrer dans l’espace de la foi. D’un point de vue théologique, la notion de sanctification est venue enrichir celle de justification à laquelle les doctrines classiques, luthéro-réformées s’étaient arrêtées. 

Ces mouvements de réveils se sont diffusés grâce à de multiples Sociétés : de traduction et de diffusion biblique, d’évangélisation intérieure, de mission extérieure, etc., portées par des courants initiaux divers : piétisme dans l’aire luthérienne, méthodisme dans l’aire anglicane, évangélisme dans l’aire réformée. Leur influence et leur prétention à « réveiller » des Églises jugées endormies ont progressivement permis à la communauté scientifique de mieux définir le réveil comme objet d’étude, d’en établir la genèse et les trajectoires qui dépassent le seul monde religieux protestant qui l’a vu naître. En effet de nouvelles « vagues » de réveil se sont levées dès la fin du XIXe et au début du XXe siècle, essentiellement marquées par les mouvements de sanctification qui ont engagé non seulement des luthériens, des réformés, des anglicans et des méthodistes, mais aussi des quakers, des frères de Plymouth, des moraves et des baptistes. C’est dans ces mouvements radicaux de sanctification qu’a pris racine le pentecôtisme.

Le présent Congrès, soutenu par les Sociétés savantes et les Centres universitaires cités en tête, qui ont multiplié les travaux sur les mouvements de réveil dans l’Europe et les États-Unis d’Amérique dans une approche multidisciplinaire, entend élargir leurs recherches vers la francophonie, en Afrique et à Madagascar, en Asie, dans les Caraïbes et le Pacifique. Dès le début du XIXe siècle, cette aire géographique et linguistique (comme d’autres) a été au bénéfice du déploiement des mouvements de réveil à travers la mission. Mais, au fur et à mesure que ces mouvements y ont engendré de nouvelles chrétientés et communautés ecclésiales s’émancipant des modèles hérités/exportés, les réveils ont pris des formes spécifiques et connu des diversifications, reçu de nouveaux héritages qui ont enrichi le patrimoine religieux mondial en opérant avec les cultures et les religions traditionnelles des antithèses (rupture) et des synthèses (continuité) inédites. C’est à leur repérage et à leur reconnaissance, que ce Congrès souhaite s’atteler pour tenter de donner aux mouvements protestants de réveil dans le monde francophone (Afrique, Asie, Caraïbes, Pacifique) plus de place dans la recherche qu’ils ne l’ont actuellement.


Lieu : Institut protestant de théologie, 45 avenue Villeneuve d'Angoulême, 34000 Montpellier

Renseignements IPT : 04-67-06-45-71


Diffusion en visio : 

Le congrès sera également diffusé par ZOOM :

ID de réunion : 966 9682 5676

Code secret : 844560


Programme détaillé 

Jeudi 1er juin (14h30-18h30) 

 

Ouverture du Congrès

 

David BUNDY, Directeur associé du Manchester Wesley Research Centre : « Conséquences imprévues : Diversification du christianisme protestant en Afrique francophone depuis la Conférence de Berlin en l’Afrique du Nord et au Congo »

 

Jean DECORVET, Recteur de la Haute École de Théologie protestante de Saint Légier (Suisse) : « Quel avenir pour l’Église “réveillée” ?  Étude sur les liens entre modèles eschatologiques et entreprises missionnaires au sein des mouvements de réveil à Genève »

 

William KOSTLEVY, chercheur invité au Asbury Theological Seminary de Willmore (Kentucky - USA) : « Tester la thèse bipartite : J. W. Haley et l’expérience de l’Église méthodiste libre en l’Afrique francophone »

 

Michèle SIGG, chercheuse au Center for Global Christianity and Mission de l'Université de Boston (USA) : « Le Dictionnaire Biographique des Chrétiens d’Afrique : Raconter la vie des revivalistes comme base des histoires de réveil en Afrique francophone »

 

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Vendredi 2 juin 2023

9h – 12h

Alexandre ANTOINE, professeur d’histoire de l’Église à la Faculté libre de théologie évangélique de Vaux-sur-Seine : « L’implantation du pentecôtisme en Afrique francophone, succès et échecs des Assemblées de Dieu de France en terrain missionnaire africain (1937-1968) »


Gunilla Nyberg OSKARSSON (Institut d’Études pentecôtistes d’Uppsala, Suède) : « Églises pentecôtistes classiques en Afrique francophone. Exemples venants de la RDC, du Burundi et du Rwanda » 


Dave EMMETT, Emmanuel Theological College de Chester (G.B.) : « W.F.P. Burton et l'arrivée du pentecôtisme au Congo belge »

 

Benoît Amina LWIKITCHA, professeur d’éthique à la Faculté de Théologie protestante de l’Université Évangélique en Afrique en République Démocratique du Congo : « Le Centenaire d’évangélisation pentecôtiste au Kivu en République Démocratique du Congo (1921-2022) : État des lieux, défis et perspectives pour la mission holistique »

 

14h-17h

Mwamba KANONGE DICHK, directeur de l’Institut Supérieur de Théologie Évangélique de Lubumbashi (ISTELU) : « Expansion et déclin du pentecôtisme au Katanga et ses environs : une évaluation critique » 

 

Jean-François ZORN, professeur honoraire d’histoire contemporaine à l’Institut protestant de théologie, Faculté de Montpellier : « Un réveil pentecôtisant en mission au Gabon dans les années 1930 entre tradition et colonisation »

 

Théophile KADIMA MULANDA, doctorant laboratoire CRISES – Université Paul-Valéry Montpellier 3 : « Renforcement des stratégies du vivre ensemble dans le protestantisme francophone en République Démocratique du Congo (de 1978 à aujourd’hui) »

 

  • 18h : Conférence publique de M. Sébastien FATH, chargé de recherche au CNRS/EPHE : « Les Réveils protestants, moteurs d'une altermodernité francophone ? »

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Samedi 3 juin 2023 (9h-12h)

Jean-Louis PRUNIER, président de la Société d’étude du méthodisme français : « Le méthodisme wesleyen français en Algérie (1885-1919), entre mythes et convictions, concurrences et solitude, évolutions et contraintes »     

 

Olivia LEGRIP-RANDRIAMBELO, chercheure associée au LARHRA (URM 5190), Université Lyon 2 : « Quatre réveillés et des bergers. Un mouvement de Réveil à Madagascar »

 

Dominique RANAIVOSON, maître de conférences HDR en littérature comparée à l’Université de Lorraine : « Le Fifohazana malgache : un Réveil sans étrangers »

 

Sègbégnon M. GNONHOSSOU, professeur de missiologie wesleyenne à l’Université protestante d’Afrique de l’ouest (Upao / Porto-Novo) : « L’histoire du réveil protestant au Bénin : une évaluation missiologique »

 

Clôture du congrès


Retour sur le colloque  avec Sébastien Fath, chercheur

Entre revivalisme protestant et francophonie, c’est une longue histoire. Un récent colloque international tenu à Montpellier (du 1er au 3 juin 2023) nous permet d’en savoir plus sur les recherches actuelles. Remercions les organisateurs, en particulier Pierre-Yves Kirschleger (historien, Université Paul Valéry Montpellier III), Jean-Louis Prunier (président de la société d’étude du méthodisme français), David Bundy (MCWRC), ainsi que Gilles Vidal et Jean-François Zorn (IPT), d’avoir eu l’audace de monter ce projet !

Intitulé « Les mouvements protestants de Réveil dans le monde francophone », il s’est déployé sur quatre demi-journées à la fois stimulantes et conviviales. Il a bénéficié pour cela de l’accueil accordé par le doyen Gilles Vidal à l’Institut Protestant de Théologie (IPT) de Montpellier, le campus de l’Université Paul Valéry n’étant pas disponible en raison de blocages et dégradations perpétrés par des agitateurs. Alternant entre salle des conférences et bibliothèque, non loin des allées ombragées d’un parc magnifique, les interventions ont pu se succéder, tantôt en présentiel, tantôt en distantiel (visioconférence), dans un climat chaleureux éclairé par de nombreux échanges et discussions. Saluons la volonté affichée par les organisateurs de sortir du confort d’un cadre franco-français réducteur. Des collègues venus d’autres horizons européens (Royaume-Uni, Suisse, Suède), africains (Bénin, Congo RDC, Madagascar) et même américains (Etats-Unis) ont apporté un grand bol d’air frais aux réflexions communes.

Quatre demi-journées de réflexion

L’argumentaire du colloque a posé le cadre : « Nés à la charnière des XVIIIe et XIXe siècle, du sein des protestantismes historiques d’Europe, les mouvements de réveil religieux (Revival, Awakening, Erweckung), sont une réponse, pas nécessairement une opposition, au siècle des Lumières qui avait promu le règne de la raison humaine face à celui de la révélation divine. Ces mouvements, prétendant opérer une « seconde Réforme », ont voulu redonner vigueur à la lecture de la Bible devenue rare dans un pays comme la France, et faire place à l’émotion et à l’expérience religieuse pour entrer dans l’espace de la foi ».

Sur ces bases, la première après-midi du colloque s’est ouverte avec une mise en perspective historique à partir de la Conférence de Berlin signée David Bundy.

Cet exposé très riche a été suivi par un regard renouvelé sur le Réveil de Genève (Jean Decorvet), une plongée dans l’histoire de l’Église méthodiste libre en Afrique francophone (William Kostlevy) et un retour sur le Dictionnaire biographique des chrétiens d’Afrique (Michèle Sigg).

Alexandre Antoine a entamé la séance du vendredi matin avec un regard sur l’implantation du pentecôtisme en Afrique francophone, suivi de trois enquêtes fouillées sur l’Afrique centrale (Gunilla Nyberg Oskarsson, Dave Emmett et Benoît Amina Lwikitcha). De 14h à 17h, ce fut au tour de Mwamba Kanonge Dichk (pentecôtisme au Katanga), Jean-François Zorn (réveil pentecôtisant au Gabon) et Théophile Kadima Mulanda (unité et diversité du protestantisme en RDC) de nourrir les réflexions communes.

Après une conférence publique invitant à réfléchir à la modernité du revivalisme, le colloque s’est poursuivi et parachevé le samedi matin avec une fascinante reconstitution, par Jean-Louis Prunier, des tentatives d’évangélisation du méthodisme wesleyen en Kabylie algérienne, suivie par deux contributions très complémentaires consacrées au Réveil malgache, ce mouvement Fifohazana porté par et pour les Malgaches (Olivia Legrip-Randriambelo et Dominique Ranaivoson). Segbégnon M. Gnonhossou a fermé le ban avec une mise en perspective de l’histoire du réveil protestant au Bénin.

Pistes à poursuivre

On ne saurait ici rendre toute la richesse des interventions proposées. Une publication, très attendue, permettra de se plonger dans les travaux présentés. On retiendra cependant quatre fils directeurs.

Le premier, c’est le découplage entre revivalisme et colonisation. Depuis le XIXe siècle, la Société des Missions de Paris, étudiée par Jean-François Zorn, fut une œuvre de réveil largement indépendante des intentions coloniales. De même, le revivalisme postcolonial a non seulement maintenu, mais même intensifié la présence protestante dans la francophonie. Le revivalisme protestant en francophonie ne saurait être réduit à un effet de la colonisation. Il a précédé le moment colonial, et s’est maintenu (même intensifié) après les décolonisations.

Le second fil directeur, c’est la créativité manifestée au sein de la plupart des mouvements de réveil étudiés, avec non seulement la création de nouvelles assemblées, mais aussi des pratiques innovantes ou des ministères inédits, comme celui de Berger, très populaire au sein du revivalisme malgache.

Le troisième, c’est l’importance des circulations francophones, portées par le partage d’une langue mais aussi de nombreuses sociétés et réseaux déployés non pas dans une logique nationale, mais transnationale.

Enfin, la question s’est posée aussi de l’interprétation à donner au revivalisme comme « fait social total », au regard des enjeux de modernisation et de démocratisation des sociétés francophones contemporaines. Le revivalisme fonctionne-t-il toujours comme un levain modernisateur et/ou prophétique, ou s’inscrit-il parfois (en particulier lorsqu’il devient phénomène de masse) dans une posture néo-conformiste, vulnérable aux récupérations populistes et complotistes ? Autant de questions à poursuivre, qui témoignent de la fécondité scientifique des terrains abordés lors de ce beau colloque montpelliérain.

Fil-info-francophonie - le 13 juin 2023

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